NIET du Conseil des États à la Biodiversité et aux calculs de l’administration

13.06.2023 | Biodiversité |

Troupeau de vaches à la désalpes
Drapeau français

Source

Presse
Drapeau français

Langue

Français
Territoire Suisse avec croix fédérale

Région

Suisse
Palais fédéral

Thème

Politique suisse
Troupeau de vaches à la désalpes

En mars 2022, le Conseil fédéral a transmis au Parlement un message proposant de repousser l’initiative populaire intitulée « biodiversité » tout en lui opposant comme contre-projet indirect une modification de la loi sur la protection de la nature et du paysage.

Le Conseil des États a, le 13 juin 2023, refusé d’entrer en matière sur ce contre-projet par 28 voix contre 14 et 1 abstention. Le contre-projet du Conseil fédéral avait été accepté en septembre 2022 par le Conseil national qui avait suivi l’exécutif dans les grandes lignes tout en renonçant à reprendre l’objectif de 17% de zones protégées présenté comme une sorte de traduction de l’initiative dans les faits. Pour le gouvernement, cet objectif est ambitieux dans la mesure où ces zones n’atteignent que 13,4% actuellement. Dans ce domaine, on nage d’après-moi dans un flou plus qu’artistique : selon les accords internationaux (accords d’Aïchi de 2010), ces 17% auraient dû être atteints en 2020 déjà, ce qui n’empêche aucunement la Suisse de s’engager à la COP de Künming/Montréal fin 2022 pour une proportion de 30% à l’horizon 2030.

La majorité du Conseil des États est formée dans ce cas de représentants de l’agriculture et des régions de montagne, emmenés par l’Union Démocratique du Centre (UDC), qui a fait de la remise en question de la protection de l’environnement un de ses chevaux de bataille, à côté de la lutte contre l’immigration et l’Europe.

Les débats dans la ‘Chambre haute’ sont intéressants à étudier. Cette fois, on voit poindre plus clairement que précédemment l’argument que la Suisse en fait déjà beaucoup et que la situation n’est pas si dramatique. Notamment, c’est l’approche ‘restrictive’ et ‘puriste’ de l’Office de l’environnement (OFEV) qui est remise en question. Cet office a d’ailleurs dû produire un nouveau rapport sur demande de la Commission du Conseil des États . Ce rapport de mars 2023 reflète les contorsions de cet office, contorsions qui doivent vraisemblablement beaucoup à l’arrivée d’un conseiller fédéral UDC à la tête du département. On y comprend que l’on a oublié de nombreuses zones aussi protégées et qu’il faudrait leur adjoindre des zones cantonales, quand bien même la Confédération ne dispose pas de chiffres fiables dans ce domaine. Avec ce tour de passe-passe, on arrive à une proportion actuelle de 23,4% – soit 10% de plus que les précédentes estimations du Conseil fédéral. Cerise sur le gâteau, tout semble plus ou moins sous contrôle à l’horizon 2030 ! :

Bilan II : grâce à la mise en œuvre de décisions politiques déjà prises (p. ex. les réserves forestières au sens de la Politique forestière 2020 ou les corridors faunistiques au sens de la révision de la LChP) – et en fonction des modalités du contre-projet indirect (aires de biodiversité, zones cantonales de protection des poissons) – ainsi qu’aux travaux de mise en œuvre en cours (planification cantonale et mise en œuvre de l’infrastructure écologique), la Suisse pourrait atteindre un total de 28 % à l’horizon 2030. (Rapport, p. 17).

Le dossier retourne donc au Conseil national, qui a déjà suivi le Conseil fédéral en refusant l’initiative. Le Conseil des États ne s’est, lui, pas encore prononcé, mais il semble avoir choisi la confrontation avec les milieux de défense de la biodiversité.