La Convention sur la diversité biologique date de 1992. Lors de la Réunion des parties (COP) de 2010 au Japon des objectifs ont été définis à l’horizon 2020, notamment l’extension des zones protégées à 17% de la surface des pays. Le bilan et la définition des prochaines étapes devaient être discutés à la COP 15 prévue en 2020 à Kunming en Chine. Suite à la pandémie, cette réunion a été reportée au 11-24 octobre 2021. C’est dans ce contexte que le secrétariat de la convention vient de publier le 12 juillet son « Premier projet de cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020″.
Ce document définit une vision et des objectifs à l’horizon 2050, ainsi que de nombreux jalons pour 2030. Parmi les cibles pour 2030, on mentionnera :
- Les zones de préservation de la biodiversité seront portées à 30% du territoire
- L’introduction d’espèces invasives sera réduite d’au moins 50%
- Les nutriments introduits dans l’environnement seront réduits de 50% et les pesticides de 66%
- La contribution de la nature à la réduction des émissions de CO2 sera d’au moins 10 GT par an
- Les subventions et contributions défavorables à la biodiversité seront réduites d’au moins 500 milliards USD par année
- Les aides financières aux pays en développement augmenteront d’au moins 200 milliards USD par année.
A mon avis, la Suisse devrait pouvoir accepter une grande partie de ces propositions. Le principal problème découle du quasi doublement des surfaces protégées. Aujourd’hui le Conseil fédéral propose comme contre-projet aux initiatives écologistes de porter ces zones à 17% du territoire suisse, ce qui équivaut à l’objectif accepté en 2010 dans le cadre des objectifs d’Aïchi. On est donc loin des 30% proposés par les Européens, qui, eux, bénéficient de surfaces suffisantes. Devrons-nous compter les alpes dans les zones protégées, fermer les stations de sport d’hiver et fermer les cabanes du Club alpin (dont je suis membre….) ?
Une autre cible mérite notre attention : la 15, qui précise :
« Toutes les entreprises (publiques et privées, grandes, moyennes et petites) évaluent et rendent compte de leurs dépendances et de leurs impacts sur la biodiversité, du niveau local au niveau mondial, et réduisent progressivement les impacts négatifs de moitié au moins et augmentent les impacts positifs, en réduisant les risques liés à la biodiversité pour les entreprises et en s’orientant vers des méthodes d’extraction et de production, des chaînes d’approvisionnement et de fourniture, ainsi que des pratiques d’utilisation et d’élimination parfaitement durables. »
L’idée générale est la même, mais on est loin des exigences posées au secteur financier par les organisations écologistes.
Cette description des objectifs est complétée par un document technique d’un grand intérêt dans la mesure où il s’agit d’une « Proposition d’indicateurs-phares du cadre de suivi pour le cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020 »
Ce document décrit 38 indicateurs-phares. Une analyse plus approfondie montre que seule une douzaine existent aujourd’hui. Autant sont « presque prêts » et le reste doit encore être élaboré. Pour l’étendue des zones protégées, les informations seront bien sûr livrées par les états signataires de la Convention. Par contre, la mesure de l’objectif concernant directement la biodiversité est particulièrement intéressant. L’objectif est décrit de la manière suivante :
« le taux d’extinction a été divisé par dix au moins et le risque d’extinction des espèces dans tous les groupes taxonomiques et fonctionnels est réduit de moitié; la diversité génétique des espèces sauvages et domestiquées est sauvegardée en maintenant la diversité génétique de toutes les espèces à au moins 90 %. ».
Les indicateurs proposés sont relativement « basiques » : il s’agit d’abord de l’évolution de l’indice des espèces menacées fourni par l’UICN, puis de la comptabilité environnementale de l’ONU (seea.un.org/ecosystem-accounting). Comme autre source, on peut citer le réseau GEOBON qui réunit des chercheurs qui établissent un bilan de l’évolution de la biodiversité sur la base de l’analyse des photos prises par les satellites à un niveau très fin (carrés d’un km de côté). Dans tous les cas on est loin des modèles économiques entrées-sorties et d’abondance des espèces par unité de surface proposés dans d’autres contextes.
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