Missionnaires végétariens

8.05.2021 |

Justice climatique
Justice climatique (c) voir-et-agir.ch

Au début du printemps lors d’une excursion en Suisse alémanique mon attention a été attirée par une affiche. Cette affiche grand format installée dans un abribus représentait un couple en train de faire une grillade. Il ne s’agissait pas d’une publicité de la branche des bouchers (www.viandesuisse.ch), mais d’une campagne commune des œuvres d’entraide protestante (Pain pour le prochain) et catholique (Action de carême), unies sur la plateforme « Justice climatique, maintenant » et son site internet ‘voir-et-agir.ch’.

A y regarder de plus près, on s’aperçoit que l’ombre portée par le couple hilare avec son gril ressemble à s’y méprendre à celle d’une forêt en train de brûler. En fait cette image œcuménique ne vise pas à protéger les forêts suisses détruites pour produire du charbon de bois, mais plutôt à nous faire prendre conscience que notre consommation de viande amène une destruction des forêts tropicales….

Pour mieux comprendre il faut aller sur le site internet et y télécharger comme je l’ai fait la brochure de 38 pages qui expose les arguments de ces mouvements missionnaires. Cet exposé est accompagné de propositions de quantiques et de textes de prières. Si l’éclairage théologique reste marqué par le péché originel « Dieu prend conscience qu’il aime sa Création, même si elle est portée au mal », les arguments concernant la politique du climat semblent plus contemporains.

L’argumentation est limpide et simple (brochure p. 3): « une consommation excessive de viande nécessite une production importante de fourrage et de grandes superficies de pâturages. Cela exige entre autres de brûler la forêt tropicale pour la défricher. L’absence de forêt tropicale provoque à son tour des changements climatiques importants. » Finalement « Pour préserver la Création, il est nécessaire que nous adoptions un mode de vie plus sobre. »

Traduite dans le contexte politique helvétique cette approche prend une tournure plus pragmatique : ces organismes d’entraide demandent en effet que la loi sur le CO2 entre en vigueur le plus rapidement possible. Toutefois, la démonstration ne s’arrête pas en si bon chemin. Non seulement la Suisse par ses importations émet indirectement plus de CO2 (65 mio. t.) que par sa production directe (46 mio. t.), mais elle est responsable d’une charge dix fois plus grande dans la mesure où « plus d’un milliard de tonnes de CO2 est émis par la place financière suisse qui investit des fonds dans des activités néfastes pour le climat»

C’est à partir de la même argumentation que ces organisations d’entraide ont déposé le 30 avril 2021 une pétition signée par 13 929 personnes demandant à la BNS de désinvestir immédiatement des énergies fossiles. Mon intérêt d’économiste n’est pas de revenir sur le syndrome de culpabilité, mais plutôt de m’intéresser au rôle de la place financière en matière de réchauffement climatique, ce qui fera l’objet d’autres contributions.

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